Brève Présentation

La Cour Suprême est la plus Haute juridiction placée au sommet de la pyramide judiciaire de la République de Guinée. Elle a porté, au début de l’indépendance, le nom de Tribunal Supérieur de Cassation (de 1959 à 1984), de Cour Suprême (de 1984 à 1986), de Chambre Nationale d’Annulation (de 1986 à 1991) et depuis 1991 elle porte le nom de COUR SUPRÊME. La Cour Suprême est unique en République de Guinée. Elle a son siège à Conakry dans un cadre enchanteur au bord de l’Océan Atlantique dans le bâtiment réalisé par l’architecte Sénégalais Pierre Goudiaby inauguré le 21 avril 1995 par le Général Lansana CONTE, Président de la République. Les compétences, l’organisation, les formations et le fonctionnement de la Cour Suprême sont réglementés par la Loi Organique L/2017/N° 0003/AN du 23 février 2017 portant attributions, organisation et fonctionnement de la cour suprême en 171 articles.

A- Les compétences de la Cour Suprême : La Cour Suprême a une compétence nationale entière dans l’ensemble des juridictions. Elle est la conscience de la Nation tout entière. Aux termes des dispositions des articles 2 à 6 de la Loi Organique L/2017/N° 0003/AN du 23 février 2017, la Cour suprême a une compétence juridictionnelle et une compétence consultative.

  • La Cour suprême est juge en premier et dernier ressort de la légalité des textes règlementaires et des actes des autorités exécutives, ainsi que des dispositions de forme législative à caractère réglementaire.
  • La Cour se prononce sur les pourvois en cassation contre :
  • les arrêts et jugement rendus en dernier ressort par les juridictions inférieures ;
  • les décisions rendues en dernier ressort par les organismes administratifs à caractère juridictionnel ;
  • les décisions du Conseil d’arbitrage des conflits collectifs du travail.

Elle connait des arrêts de la Cour des comptes par la voie du recours en cassation.

Elle connait, par la voie du recours en cassation ou en annulation, des décisions des cours et tribunaux relatives aux autres contentieux administratifs.

  • La Cour suprême se prononce, en outre, sur :
  • les demandes en révision en matière pénale ;
  • les demandes de renvoi d’une juridiction à une autre pour cause de suspicion légitime ou de sûreté publique ;
  • les règlements de juges entre juridictions n’ayant au-dessus d’elles aucune juridiction supérieure commune, autre que la Cour suprême ;
  • les demandes de prise à partie contre un membre d’une Cour d’appel ou toute une Cour ;
  • les contrariétés de jugements ou arrêts rendus en dernier ressort, entre les mêmes parties et sur les mêmes moyens, par différentes juridictions ;
  • les poursuites pénales dirigées contre les magistrats de la Cour suprême, de la Cour constitutionnelle, de la Cour des comptes et des Cours d’appel.
  • La Cour suprême donne son avis sur les projets de lois et de décrets et sur les actes réglementaires qui lui sont soumis par le Président de la République ou le Président de l’Assemblée nationale.

La Cour est saisie par le Président de la République ou l’Assemblée nationale pour donner son avis, préalablement à leur inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, sur les projets ou propositions de loi qui lui sont soumis.

  • La Cour suprême délibère en Assemblée générale consultative.

Lorsque l’urgence est signalée par le Président de la République, la Cour statue, à titre exceptionnel, en commission juridictionnelle.

Elle s’attache à vérifier la régularité formelle du texte de loi, son opportunité et sa cohérence avec la législation en vigueur et propose, s’il y a lieu, la formulation normative appropriée.

Elle veille, en outre, à la bonne rédaction de la partie du texte dont l’ambiguïté peut prêter à confusion.

B – La composition de la Cour Suprême : La Haute juridiction guinéenne se compose :

Au siège :

  • du Premier Président ;
  • de Présidents de chambre ;
  • de Conseillers et Conseillers-maîtres ;

Au Parquet Général ;

  • du Procureur Général :
  • du Premier Avocat Général ;
  • d’Avocats généraux ;

Au Greffe :

  • du Chef du Greffe ;
  • de Greffiers en Chef ;
  • de Greffiers.

Les auditeurs et assistants de justice peuvent être affectés au service de la Cour suprême dont les modalités de recrutement sont fixées par décret.

Il est créé un service de documentation d’étude et de recherches placé sous l’autorité du Premier Président de la Cour suprême.

La Cour suprême comprend actuellement :

Un Premier Président ;

Six Chambres :

  • Une Chambre administrative ;
  • Une Chambre pénale ;
  • La Première Chambre civile, commerciale et sociale ;
  • La Deuxième Chambre civile, commerciale et sociale ;
  • La Troisième Chambre civile, commerciale et sociale ;
  • La Quatrième Chambre civile, commerciale et sociale.

Quinze Conseillers et Conseillères ;

Trois Conseillers-Maîtres ;

Quatre Auditeurs de Justice.

Au Parquet Général :
– Un Procureur Général ;
– Un Premier Avocat Général ;
– Sept Avocats Généraux.

Au Greffe :
– Un Chef du Greffe ;
– Des Greffiers et Greffières en Chef ;
– Des Greffiers et Greffières.

C – L’âge de la retraite, le régime des incompatibilités, des immunités et l’ordre de préséance 

1 – L’âge de la retraite : Les magistrats de la Cour suprême sont admis à faire valoir leur droit à la retraite à l’âge de 70 ans.

2 – Le régime des incompatibilités : Les fonctions de membre de la Cour Suprême sont incompatibles avec la qualité de membre du Gouvernement, de l’Assemblée Nationale ou d’un Cabinet Ministériel, avec l’exercice des professions d’Avocat, d’Officier ministériel, d’auxiliaire de la Justice et de façon générale toute activité professionnelle privée. L’exercice de toute autre activité publique doit être autorisé par le Premier Président, le Bureau entendu.

3 – Les immunités : Sauf cas de flagrant délit, les magistrats de la Cour suprême ne peuvent être poursuivis, arrêtés, détenus ou jugés qu’avec l’autorisation préalable de l’assemblée générale de la Cour suprême.

Celle-ci attribue compétence à la juridiction qu’elle détermine.

4 – L’ordre de préséance : L’ordre de préséance à la Cour Suprême est réglé comme suit :

  1. le Premier Président ;
  2. le Procureur Général ;
  3. les Présidents de Chambre, le Premier Avocat général ;
  4. les Conseillers, les Conseillers-Maîtres et les Avocats généraux ;
  5. le chef du Greffe, les Greffiers en chef ;
  6. les Greffiers.

Lorsque des magistrats de la Cour suprême ont parité de titre, ils prennent rang, entre eux, dans l’ordre et la date de leur nomination et, s’ils ont été nommés par un même décret ou par des décrets différents mais du même jour, d’après l’ordre de leur prestation de serment.

 D- Les formations de la Cour Suprême  : Les formations de la Cour Suprême sont : Les Chambres, les Chambres réunies et l’Assemblée générale.

1 – Les Chambres de la Cour Suprême sont au nombre de six actuellement avec les attributions suivantes :

  • La Chambre administrative connaît :- en premier et dernier ressort, des recours en annulation pour excès de pouvoir, de la légalité des actes des collectivités locales ;

    – du caractère règlementaire des certaines dispositions de forme législative ;

    – des pourvois en cassation contre les décisions rendues en dernier ressort sur le contentieux de pleine juridiction et les Arrêts de la Cour des comptes ;

    – du recours en cassation contre des décisions rendues par les organismes administratifs à caractère juridictionnel.

  • La Chambre pénale connaît des pourvois en cassation en matière pénale.
  • Les Chambres civiles, commerciales et sociales se prononcent sur les pourvois en cassation en matière civile, sociale et commerciale, à l’exception des pourvois contre les décisions relatives aux Actes Uniformes de l’OHADA.

2 – Les Chambres réunies : Les Chambres réunies comprennent les Présidents de Chambre et les Conseillers sous la présidence du Premier Président.

La formation des Chambres réunies connaît des règlements de juges, des demandes de récusation d’un magistrat de la Cour suprême ou d’un Premier Président de cour d’appel, des demandes de renvoi d’une juridiction à une autre pour cause de suspicion légitime ou de sûreté publique.

Elle se prononce sur la requête de rabat d’arrêt, les affaires renvoyées devant elle, soit par ordonnance du Premier Président, soit par arrêt d’une Chambre.

Les Chambres réunies peuvent valablement délibérer si au moins neuf de membres sont présents. Les décisions sont prises à la majorité.

La formation des Chambres réunies siège toujours en nombre impair.

3 – L’Assemblée générale : L’Assemblée générale comprend la totalité des membres de la Cour énumérés à l’article 7 de la Loi Organique L/2017/N° 0003/AN du 23 février 2017. L’assemblée générale de la Cour suprême se réunit sur convocation du Premier Président.

Elle se réunit également sur convocation du Premier Président, à la demande du Procureur général ou d’un tiers de ses membres.

Elle est présidée par le Premier Président ou, à défaut, par le Procureur général ou, en cas d’empêchement de ce dernier, par un Président de chambre ou, à défaut, par le Premier Avocat général.

E – DES COMMISSIONS JURIDICTIONNELLES : La Cour suprême dispose de deux Commissions juridictionnelles :

– la commission juridictionnelle chargée de statuer sur les demandes d’indemnités présentées par les personnes ayant fait l’objet d’une décision de détention provisoire et qui ont bénéficié d’une décision définitive de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement ;

– la commission juridictionnelle chargée de statuer sur les recours formés par les officiers de police judiciaire ayant fait l’objet d’une décision de suspension ou de retrait d’habilitation.

F – RÔLE, PLACE, FINALITÉ ET MISSIONS DE LA COUR SUPRÊME DANS L’ENSEMBLE DES JURIDICTIONS :

1 – Rôle de la Cour Suprême : La Cour Suprême ne constitue pas un troisième degré de juridiction. Elle a pour rôle d’assurer l’unité de la jurisprudence dans l’interprétation des règles de droit. La Cour Suprême est et demeure une juridiction de cassation. Elle n’est pas juge de fait mais de droit. C’est ainsi que la Cour Suprême n’apprécie pas les faits mais les accepte tels qu’ils sont déférés. Les faits, il faut le rappeler, sont souverainement appréciés par les Juges du fond. En considération de ces éléments, la Cour Suprême vérifie s’il y a eu violation de la loi : Dans ce cas, elle casse la décision déférée et renvoie l’affaire, soit devant la juridiction l’ayant connue mais autrement composée, soit devant une autre juridiction du même ordre, de même nature ou de même degré. Par contre, si elle estime que la loi est bien appliquée, elle rejette le pourvoi. Toutefois, la Cour Suprême a la possibilité, en cas de cassation, d’évoquer et de statuer au fond lorsqu’elle est à nouveau saisie d’un nouveau jugement ou arrêt attaqué par les mêmes moyens que le premier. Le rôle de la Cour Suprême en matière pénale est plus large puisque la Cour Suprême peut être saisie non seulement d’un pourvoi en cassation mais aussi d’un pourvoi en révision ; alors qu’en matière civile, seul un pourvoi en cassation peut être porté devant la Cour Suprême.

2 – Place de la Cour suprême : La Cour suprême tient sa place du fait de la Loi Fondamentale guinéenne qui admet la séparation des pouvoirs. Ses attributions, son organisation et son fonctionnement sont prévus par la Loi Organique L/2017/N° 0003/AN du 23 février 2017. Cette place fait que la jurisprudence de la Cour suprême bien que ne s’imposant pas en général aux juridictions inférieures n’est pas moins respectée par celles-ci.

3 – Finalité de la Cour suprême : Le pouvoir de dire le droit n’a nullement pour but d’empêcher la naissance de procès voués à l’échec en raison des solutions déjà données par la Cour suprême. A l’instar des autres Hautes Juridictions africaines, la Cour Suprême de Guinée fait sienne l’idée que la jurisprudence n’est pas immuable et que des revirements ne sont pas impossibles. Ce souci tient au fait que par son contrôle, la Cour suprême coordonne l’activité judiciaire des juridictions inférieures, et à ce titre, veille à la mise en place de l’administration d’une bonne Justice dans le pays. La Cour Suprême n’est pas tenue d’informer le législateur en ce qui concerne l’examen du contentieux qui lui est soumis. En revanche, elle a la possibilité d’informer le Législateur sur les difficultés d’application des Lois et des Règlements toutes les fois qu’elle est saisie par le Président de l’Assemblée Nationale aux fins d’avis sur des propositions de loi.

4 – Missions de la Cour suprême : La Cour suprême a pour mission de favoriser l’unité de la jurisprudence, régulatrice efficace du système judiciaire. Au regard de sa mission de gardienne de la loi, la Cour suprême, par sa jurisprudence, « Fontaine de Jouvence de la Loi » pour reprendre l’expression de Mazeaud-de-Juglart, contribue largement, à harmoniser les textes de Lois votées par le Législateur guinéen. C’est ce que les Hauts Magistrats ont compris en poursuivant cette œuvre jurisprudentielle pour permettre aux textes de s’adapter à l’évolution sociale car, les profonds changements opérés depuis 1984 font que sa jurisprudence s’opère dans les idées, dans les mœurs, dans les Institutions, dans l’état économique et social de la Nation tout entière. La Cour suprême est chargée de censurer la violation de la Loi. C’est le principe essentiel à retenir.

 

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